Aujourd'hui, j'ai 31 ans... 31 bon sang. Quand on est môme, on se dit qu'on a toute la vie devant soit, qu'on est immortel, qu'on est invincible. Et pourtant les années filent... Et on ne s'en rend même pas compte.
C'est un curieux mélange de mélancolie et de joie qui m'envahit. Être entouré de mes quelques (rares) vrais amis me fait plaisir bien entendu, et comment ne pas sourire en voyant Roy faire l'imbécile et me tanner pour que je souffle ces foutues bougies ?
Mais d'un autre côté je me sens vieux. À la trentaine ça peut paraître ridicule mais quand on sait qu'on a déjà gaspillé 25 ans de sa vie, on veut rattraper le temps perdu...
Mais quels regrets pourrais-je avoir, moi le gosse de riche, le nanti ?
Après tout, j'avais eu une enfance dorée c'était le moins qu'on puisse dire. Pourri gâté par Papa et Maman dès la plus tendre enfance, l'unique héritier de l'empire Queen ne manquait jamais de rien. Quand vos parents sont de riches industriels disposant de la plus grosse fortune de la ville, voir le moindre de vos caprices exaucé n'est pas très compliqué... La seule condition était que j'accepte de suivre de temps en temps un cours d'art martial barbant ou une séance de tir à l'arc. Je n'ai jamais compris pourquoi mon père tenait à me faire faire tout ça, mais je ne m'en souciais pas beaucoup à l'époque. Pourvu qu'il m'achète la dernière merde en plastique à la mode et ça me suffisait. "Un esprit sain dans corps sain" me disait-il tout le temps. "Un homme n'est rien s'il n'a pas l'un et l'autre". Je ne me rendrais compte que bien plus tard l'immense sagesse contenu dans ces paroles...
Mais le petit con que j'étais ne pouvais pas saisir l'importance de telles leçons de vie. Je faisais ce qu'on me disait et sans que ça m'intéresse plus que ça. Pourtant j'obtenais des résultats tout à fait corrects... Un peu comme à l'école en fait. J'avais beau être un parfait petit branleur, le pire de mes défaut m'avait toutefois empêché d'être un total bon à rien : mon ego. J'aimais être bon et quand je faisais quelque chose, je m'appliquais. Et comme par chance, dieu le père m'avait doté d'un cerveau pas trop à la ramasse, j'avais d'excellente capacités d'apprentissage : j'apprenais vite et je m'adaptais à a situation.
Les années passèrent et arriva inévitablement l'âge ingrat. Et me concernant, le qualificatif n'était pas exagéré... J'emboutissais des voitures de sport à 100 000 dollars en moyenne une fois par mois et la fumette, l'alcool et les filles avaient sérieusement commencé à affecter mes résultats scolaires. Et avec tout ça, papa Queen commençait à se demander si j'aurai un jour les épaules de prendre la relève et de diriger l'affaire familiale...
Et je m'en fichais pas mal pour tout dire : tout ce qui m'importait était de remplir mon verre d'alcool et ma bagnole de jolies gonzesses... J'étais bien connu des forces de l'ordre de Star City qui auraient eu au moins de quoi me mettre vingt-cinq fois en garde à vue si les relations de mes vieux ne m'avaient pas permis de m'en sortir comme une fleur à chaque fois.
Malgré tout ça je n'en avais jamais assez. Il fallait toujours que j'aille plus loin, que la fête soit plus grande, plus belle, plus folle... Et pour mes vingt-et-un ans j'avais décidé de marquer un grand coup : une énorme croisière sur le yacht privé des Queen avec une liste d'invité longue comme le bras. Ce petit projet m'obnubilais tellement que j'avais à peine remarqué que Maman avait l'air bien fatigué et passait pas mal de temps au lit...
Connaissant mon légendaire sens des responsabilités, mon père avait insisté pour m'accompagner, sûrement pour s'assurer que je n'enverrais pas le
Pacific Queen par le fond. Comment l'en blâmer ?
Bien vite, le jour tant attendu arriva et pendant cinq heures, tout avait été exactement conforme à mes attentes : l'alcool coulait à flot et j'avais déjà eu l'occasion d'emmener ma conquête de la soirée visiter ma cabine privée.
Puis ensuite, tout bascula...
Mon père déboula dans ma cabine, ne prenant même pas la peine de frapper. Je m’apprêtais à lui rappeler le sens du mot "intimité" lorsque l'air paniqué sur son visage me fit comprendre que la situation était grave et que la bienséance était un luxe qu'il ne pouvait plus se permettre...
"Oliver... On a un gros problème !".Ces mots resteraient gravés en dans ma mémoire jusqu'à la fin de mes jours. Papa n'avait pas exagéré : une gigantesque tempête arrivait sur nous. Un truc comme on en voyait rarement apparemment... Il lutta pendant plusieurs longues minutes contre les éléments déchaînes, maisnotre yacht n'était certainement pas conçu pour résister à pareil déluge. La coque finipar se percer tandis que l'eau commençait à monter dans les parties inférieures du
Pacific Queen et ce fut le début de la fin.
Tout ce qui s'en suivi n'est qu'un agglomérat de souvenirs confus : les gens paniqués qui essayaient de s'enfuir alors que notre canot de sauvetage s'était fait la malle, mon père qui me passait le dernier de gilet de sauvetage en m'implorant de survivre...
"J'aurais voulu vivre assez longtemps pour voir le grand homme que tu allais devenir... On ne peut pas dire que tu m'aies rendu fier de toi ces dernières années, mais je sais qu'au fond de toi sommeille quelque chose d'exceptionnel. Poursuis ce que j'ai commencé, préserve mon oeuvre... Et veille sur ta mère. Elle aura besoin de toi, Oli. Survit et deviens fort."
Après ça, ce fut le noir... Une sensation vague de dérive, un combat acharné pour que les flots ne m'engloutissent pas. Les dernières paroles de mon père repassaient sans cesse dans ma tête : il fallait que je m'en sorte.
J'avais été ballotté par les vagues pendant ce qui m'avait semblé être des heures... Sans mon gilet de sauvetage et un débris flottant, j'aurais certainement rejoint les fonds marins. Mais le destin en avait décidé autrement.
Je reprenais connaissance sur une plage déserte, étonné d'avoir réussis à survivre à tout ce qui nous était tombé dessus. Mon premier réflexe fut de me dire que je n'étais pas le seul à m'en être sorti aussi : je me mis immédiatement à chercher d'autres survivants. Pas spécialement par altruisme, mais parce que j'avais peur. Peur de me retrouver seul, d'être livré à moi même... Il me fallait de l'aide pour survivre.
Mais rapidement je dus me rendre à l'évidence : il n'y avait eu qu'un rescapé. Et c'était moi. J'avais pris des heures et des heures à parcourir la plage dans l'espoir de trouver quelqu'un et au final je n'avais ni pris le temps de me faire un abri de fortune et encore moins de me trouver à manger. La nuit allait être difficile...
En me réveillant j'avais froid et faim. Et si j'avais réussis à me me sustenter un peu avec des fruits glanés dans des arbres, j'étais bien conscient que ça ne suffirait pas longtemps. Il me fallait du feu, de la nourriture et un refuge. Plus facile à dire qu'à faire... Il fallait que je me souvienne de tout e que j'avais laissé de côté toutes ces années : le tir à l'arc notamment. Avec des débris retrouvé ça et là, j'avais pu me bricoler quelque chose d'assez convaincant. Cependant, les choses allaient commencer à se compliquer : qu'elles soient dans les arbres, sur terre ou dans l'eau mes cibles étaient toutes mouvantes. Et pour ne rien arranger, j'étais plus que rouillé...
Au début rien n'était simple. Mes tentatives pour faire un feu étaient assez pathétiques et je mangeais de la viande en moyenne un jour sur trois (c'est-à-dire concrètement les jours où j'avais de la chance). Mais au fur et à mesure que les jours passaient je commençais à réellement m'améliorer. Mes tirs devenaient plus précis, et chaque abri qu'un coup de vent mettait par terre m'amenait à refaire une construction plus solide que la précédente. Les choses s'arrangeaient et, au bout d'un an de survie, je finissais par me dire que j'avais peut-être une chance de m'en sortir jusqu'à l'arrivée des secours.
Trop facile me direz-vous ? Bien vu.
Je n'avais pas fini sur une île déserte ordinaire... Je me croyais seul ici, mais je me trompais lourdement.
Un matin, alors que je chassais en me dissimulant dans les fourrées j'eus la surprise d'entendre un bruit inhabituel... Et une odeur qui l'était tout autant. Le parfum typique d'une clope, accompagné d'une discussion en anglais. Par chance, l'exil m'avait rendu méfiant et j'attendis de savoir à qui j'avais affaire avant de quitter ma cachette. Et mon instinct m'avait rendu un fier service : les types qui se tenaient maintenant à quelques mètres de moi n'avaient rien de bons samaritains. Des flingues typiques de ce qui pouvait s'acheter au marché noir et la bonne vieille tête crasseuse de mercenaire pas trop regardant sur ses contrats. Même si je n'avais aucune intention de quitter ma cachette, j'étais toutefois curieux de savoir ce que ces types faisaient dans le coin... Et le meilleur moyen de l'apprendre sans se faire repérer, c'était de les suivre.
La chasse m'avait appris l'art de la discrétion et si j'arrivais à berner les méfiants herbivores de l'île, autant dire que ne pas se faire détecter par quatre gugusses pas très discrets était une véritable promenade de santé... Promenade qui se révéla finalement très instructive lorsque nous arrivâmes à destination : ces types vivaient dans une base immense entourée de champs de pavots à perte de vue. En un mot comme en cent, cette île servait de repère à un cartel de la drogue. Mais ce n'était peut-être pas forcément le pire...
Pour récolter le précieux opium, ils disposaient d'une énorme main d'oeuvre constituée d'esclaves venu apparemment de tous les horizons. Évitant les clôtures électrifiées qui encerclaient le périmètre, je m'infiltrai dans le bidonville où étaient tassés les travailleurs afin d'en savoir plus. Mais la barrière de la langue n'aidait pas vraiment et je réussis davantage à leur faire peur qu'à obtenir des informations... Jusqu'à ce que, par chance, je tombe sur une jeune latina qui maîtrisait plutôt bien l'anglais. Après pas mal de réticence, daigna enfin m'expliquer ce qu'il se passait ici.
" Ils nous enlèvent un peu partout dans le monde... Pourvu qu'on soit pauvre et isolés. Ceux qui atterrissent ici n'ont aucun espoir de revoir leur foyers. Enfin pour ceux qui en avaient un tout du moins... Ils peuvent se permettre ça parce que nous ne sommes rien aux yeux de la société. Que l'on meurt ici sous les coups de fouets ou de froid dans les grandes métropoles, quelles différences après tout... ?"
Le petit richard que j'étais ne s'étaitpas pris beaucoup de claques dans la vie. Au propre comme au figuré. Mais les paroles de cette femme me firent l'effet d'une colossale gifle... J'avais vécu toute ma vie sans jamais manquer de rien, crachant volontiers dans la soupe quand je n'avais pas ce que je voulais. Mais ces gens... Ils n'avaient rien. Et j'étais pourtant persuadé qu'ils n'étaient pas plus bêtes ou plus incapables que moi.
Ils n'avaient tout simplement pas eu un père plein aux as pour leur payer des écoles hors de prix ou rattraper la moindre de leur connerie. Ils étaient démunis, car le monde était une jungle encore plus impitoyable que celle de l'île... Et lorsque des types comme mon père avaient une fortune équivalente au PIB d'un pays pauvres, cela se faisait forcément au dépend des autres. J'avais suffisamment eu de cours d'économies dans la vie pour savoir que l'argent était une ressource limitée qui répondait, par voie de conséquence, à une logique très simple : pour qu'il y ait des milliardaires ayant des ressources à ne plus avoir qu'en faire, il fallait fatalement qu'il y ait des pauvres gens n'ayant rien. Ces gens là en l’occurrence.
Je me dégouttais... D'un certain côté je me trouvais aussi coupables que les salauds qui les avaient exploités. Toute ma vie j'avais dilapidé des fortunes sans m'en soucier, dépensant des milliers de dollars aussi naturellement que le pékin lambda qui allait s'acheter des baguettes de pain. Et je fermais bien volontiers mes yeux sur la misère en pensant qu'après tout "ce n'était qu'une bande de bon à rien...".
Mais la politique de l'autruche et l'égoïsme c'était fini. J'allais aider ces gens, quitte à en crever s'il le fallait. J'étais seul face à une armée, la mort était donc plus qu'une éventualité. Mais d'un autre côté, je n'avais plus grand-chose à perdre et tout à y gagner. Si je mettais par terre leur petite opération on pourrait tous fuir à bord des avions qu'ils utilisaient pour leurs enlèvements...
Cela commença par du travail de sape. J'abattais des patrouilles, je brûlais des entrepôts d'armes ou d'opium... Je restais discret, mais les mercenaires étaient désormais au courant : ils avaient un ennemi sur cette île.
Les sentinelles devinrent alors plus vigilantes et mieux armés lors des patrouilles ce qui me compliqua grandement la tâche. Parfois, des maladresses faillirent me coûter la vie, mais mes petites notions en combats rapprochés m'avaient à chaque fois permis de survivre. Et à chaque nouveau combat remporté de justesse, j'apprenais quelque chose. Il n'y avait pas de pitié : tous les affrontements se soldaient pas la mort et, à vrai dire dire, je ne me souciais même plus de ça... C'était eux ou moi. Ma rage et ma détermination avaient exterminés le moindre sentiment de culpabilité qui aurait pu m'assaillir.
Mais tout cela ne menait pas à grand-chose : il y avait toujours plus d'hommes et les esclaves continuaient à récolter de la drogue... Pour les arrêter définitivement je devais les priver de main d'oeuvre et opposer à leurs forces armées une résistance équivalente. Et il n'y avait qu'un seul moyen de faire d'une pierre deux coups : libérer tous les prisonniers et organiser une résistance. En restant seul je ne pouvais que les ralentir... C'était une opération risquée, mais après tout je n'étais plus vraiment à ça près. L'enjeu était toujours le même : vaincre ou mourir.
En dépouillant un garde isolé lors d'une patrouille, je parvins à me faire passer pour l'un des leurs suffisamment longtemps pour avoir accès à la salle de contrôle qui commandait la grille électrifiée et l'ouverture des portes. Même sans être un génie de l'électronique, j'étais assez fin pour comprendre que les boutons "désactiver" et "ouvrir" me permettraient d'arriver à mes fins.
Je devais maintenant me hâter de regagner l'extérieur et rassembler les esclaves avant qu'ils soient traqués et abattus en masse par les mercenaires. Mais une "petite" difficulté m'attendait non loin de la sortie. Une femme asiatique aux cheveux blancs et aux yeux glacials me lançait un regard assassin. Il n'y avait aucun doute sur ses intentions
"Alors c'est toi qui nous poses tous ces problèmes depuis un an... Tu es plutôt doué j'avoue. Je m'attendais à un type des services secrets, ou même une escouade d'agents. Qui es-tu ?"
Je n'avais pas le temps de lui répondre... Et puisqu'elle était partie à bavarder j'avais de bonnes chances de réussir à la prendre par surprise et à m'en débarrasser rapidment. Pas de chance pour moi, cette femme était pleine de ressource. Plus que moi à vrai dire... Je me fis tabasser comme jamais. Couvert de coquard et la gueule en sang je ne dû ma survie qu'à une imprudence de mon assaillante qui s'approcha de moi pour me narguer.
Ni une ni deux, je sortis deux flèches de mon carquois et lui planta dans les deux jambes...
Ainsi neutralisée je pu m'échapper et récupérer quelques esclaves qui n'avaient pas encore disparus dans la jungle. Beaucoup s'étaient dispersés dans l'épaisse forêt et quelques uns avaient même été tué par les mercenaires... Notre groupe était désorganisé, mal équipé, mal entraîné. Mais l'ennemi avait aussi été considérablement affaibli. La phase finale de mon plan pouvait commencer.
Pendant six mois, je m'affairai à rechercher les esclave éparpillés au travers de la jungle, tout en mettant en sécurité ceux que j'avais pu sauver. Afin d'échapper plus facilement à nos poursuivants, nous nous étions séparés en plusieurs groupes...
Nous récupérions des armes et de l'équipement sur les mercenaires que nous parvenions à dépouiller et petit à petit, nous préparions le coup d'éclat final. Bien sûr, cela ne se fit pas sans sacrifices et sans douleur : beaucoup de prisonniers perdirent des proches ou des amis... Et je vivais chacune de ces pertes comme un échec. Mais je ne pouvais pas abandonner : la mort de ces pauvres gens devait aboutir à quelque chose. Rendre leur sacrifice vain aurait été la pire des insultes.
Lorsque le jour fut venu, je passais à l'attaque, accompagné par une trentaine de mes alliés. Les mercenaires étaient certes nombreux, mais nous les avions considérablement affaiblis ces derniers mois... Et nous étions bien préparés.
Pour faire simple, mon plan d'attaque consistait à frapper des zones précises pour disperser l'ennemi et l'éliminer plus rapidement en le prenant en embuscade.
Dans l'ensemble tout se passa plutôt comme prévu malgré quelques inévitables pertes dans nos rangs. Mais cela n'entamait pas pour autant ma détermination : il fallait que j'atteigne les avions. Les flèches volaient dans tous les sens et je finissais par me demander si j'allais avoir assez de traits pou mener à bien mon objectif... Mais je compris rapidement que cette question n'aurait bientôt plus lieu d'être.
Elle se tenait à nouveau devant moi... La femme aux cheveux blancs. Visiblement, elle avait l'air bien décidé à me faire payer ce que je lui avais fait... En fait, c'était difficile à dire : son air menaçant semblait naturel chez elle. Sûrement une caractéristique indispensable lorsqu'on était un seigneur du crime.
Depuis notre dernière rencontre, j'avais repris la pratique intensive des arts martiaux. M'entraîner avec mes hommes m'avait permis de bien m'améliorer, d'autant plus que certains se débrouillaient mieux que moi...
Le combat commença et je compris rapidement que je ne faisais toujours pas le poids : elle était toujours bien plus rapide et sa technique était bien meilleure. Néanmoins, j'avais suffisamment progressé pour réussir à lui tenir tête sans me prendre une totale déculottée. Mais une nouvelle fois, elle me faisait perdre mon temps et je n'en avais guère devant moi... Le coup des flèches ne fonctionnerait plus, elle sy attendait sûrement. Il faudrait donc que je trouve autre chose. J'observais mon environnement en cherchant quelque chose qui m'aiderait... Et fort heureusement la chance était à nouveau avec moi. Je la laissais prendre le dessus -de toute façon elle l'avait déjà- afin qu'elle me "pousse" dans la bonne direction. Arrivé à mon objectif, je me saisis de l'extincteur et lui en vaporisa une bonne bouffée dans le visage avant de lui lancer en pleine poire. Aussi douée qu'elle soit, quelques kilos de métal l'avait assommé comme n'importe qui d'autre.
Je n'étais pas le meilleur combattant du monde mais j'étais retors... Et un brin vicelard aussi. Par deux fois elle avait sous-estimé cet aspect de ma personne et cela lui avait coûté cher.
Mes alliés m'attendaient déjà à l'intérieur du hangar... Dans quelques minutes nous serions définitivement loin de cet enfer. Après ces trois ans d'exil, l'homme qui s'apprêtait à revenir à Star City était bien différent du gamin immature qui l'avait quitté...
"Et ben Robin des bois... C'était une sacrée ballade que tu nous as fait faire !"
C'était comme ça que m'avait surnommé mes insurgés... Et c'est vrai qu'avec mon vieux sweet vert à capuche à moitié défoncé, j'avais un petit air. Quoiqu'il en soit la comparaison était plutôt flatteuse : un noble qui volait aux puissants pour aider les plus défavorisés...Tout ça me rendait, pour la première fois de ma vie, assez fier de moi.
J'aurais voulu vous dire que tout s'était arrangé une fois revenu à Star City mais à vrai dire... Pas vraiment.
Maman était très malade. Peu avant mon départ, elle avait contractée un cancer, expliquant ainsi l'air blafard et la fatigue intense qui l'avait gagnée trois ans auparavant. Elle n'allait déjà pas bien et ma disparition ainsi que celle de mon père lui avait fait perdre toute velléité de lutte. Le pronostic des médecins était loin d'être optimiste et il ne lui restait tout au plus que deux ans à vivre dans le meilleur des cas.
Et dans tout ça je me sentais... Inutile. Je ne pouvais rien pour ma mère ni pour personne. Ma vie semblait à nouveau avoir perdu tout sens. Je restais seul dans la manoir Queen à tourner en rond en me demandant quoi faire. J'assouvissais mes besoins d'action en reprenant des cours d'arts martiaux et même d'escrime mais rien n'y faisait. Même si je m'entraînais dur, ce que je faisais me semblait... Vide.
Et puis un soir j'eus une idée étrange... Repassant les restes de mon sweet à capuche et muni d'un arc flambant neuf, je me mis à patrouiller les rues et à arrêter les voleurs de sac, violeurs et autres dealers à la manque. À nouveau je me mis dans une logique d'apprentissage/adaptation/amélioration. À Star City les règles avaient changées : je ne souhaitais pas tuer mais bel et bien neutraliser mes cibles. Heureusement, Queen Industries disposait d'un pôle technologie suffisamment avancé pour que je leur "emprunte" quelques trouvailles que j'adaptais à mes projectiles. "Flèches taser" et "Flèches caoutchouc" furent mes premiers traits non-létaux et je n'avais cessé de faire des nouvelles trouvailles au cours du temps. Je me fis également un costume plus élaboré que ma capuche miteuse, me permettant ainsi de me mettre à l'abri des balles de petits calibres et des couteaux utilisés. Mon arsenal avait pas mal évolué au fil des années, profitant à chaque fois des avancées technologiques de Queen Industries pour être à la pointe de ce qui pouvait se faire.
J'arrêtais des types ordinaires, d'autres... Moins ordinaires. J'avais frôlé la mort une bonne centaine de fois, mais j'évitais de trop y penser. Au fil du temps, mes exploits m'avaient valu une petite renommée dans le milieu criminel et dans la presse, qui ne tarda pas à me donner le petit surnom de "Robin Hood". Personnellement, j'avais opté pour "Green Arrow". Je savais au fond de moi même que je n'arriverais jamais à la cheville du seigneur de Loxley, quand bien même nous nous ressemblions beaucoup. C'était ma façon de rester humble face à ce personnage légendaire.
Je rendais aussi visite à ma mère, autant que je le pouvais. Même si on ne pouvait plus s'attendre à une guérison miraculeuse elle semblait curieusement plus... Rayonnante. Apaisée. L'idée de ne pas finir ses jours seules lui avait permis de reprendre quelque forces.
Je n'avait jamais cesser de m'en vouloir terriblement... Sans mes idées stupides de croisières, Papa aurait été auprès d'elle et les choses auraient différentes. Mais comme elle me l'avait répété maintes et maintes fois ruminer sur le passé ne servait à rien : il fallait aller de l'avant. Et je devais accepter sa mort...
Trois ans plus tard elle s'éteignit finalement en paix, dépassant de loin les pronostics les plus optimistes des médecins. J'avais beau y être préparé, cela m'avait profondément affecté. Je pensais même à raccrocher mon arc définitivement. Je n'avais plus goût à rien...
Pour me divertir un peu, j'organisais un tournoi de tir à l'arc ouvert à tous, amateurs comme professionnels. Même si j'avais arrêté de jouer au justicier depuis quelques mois, l'archerie me manquait terriblement... J'avais besoin de m'y remettre et pourquoi pas avec une petite compétition après tout ? Au moins, cela me permettrait de voir du monde.
Mais encore une fois rien ne c'était passé comme prévu... Des petits malins avaient jugés bon de venir s'emparer de la récompense offerte au vainqueur et je dû à nouveau repasser le costume que j'avais juré de mettre de côté. Malgré cela, tout n'été pas a jeter : ce fut lors de cet incident que je fis la connaissance d'un petit gars plutôt doué avec un arc et des flèches... Un adolescent nommé Roy Harper. Un gamin intelligent et disposant d'un potentiel au moins équivalent au miens, sinon supérieur.
Il n'avait pas tardé à percer à jour mon secret... Et plutôt que de me faire chanter, il me proposa son aide. J'avais été un peu réticent au début, mais son entrain était tel que je finis par céder, conscient qu'avec ou sans moi, il relancerait ma vieille croisade. Vu son âge, il était très probable qu'il y laisse la peau et je ne pouvais pas me résoudre à envoyer un ado à la mort parce que j'avais choisi de me voiler la face. C'est donc ainsi que Green Arrow repris du services après de long mois d'absences, accompagné de son fidèle partenaire : Speedy.
Depuis maintenant 3 ans, nous luttons contre la mafia de Star City et endiguons comme nous pouvons la criminalité qui sévit dans les quartiers les plus pauvres de la ville. Pendant tout ce temps, j'ai entraîné Roy à se battre, lui transmettant toutes mes connaissances. Je ne suis pas éternel j'en ai bien conscience... Et le jour où je casserai enfin ma pipe, je veux être sûr que quelqu'un sera là pour reprendre le flambeau.
Depuis quelques temps, je sens qu'une nouvelle page se tourne... Les surhumains deviennent une norme, aussi bien du côté des gentils que des méchants. Et agir à l'échelle de Star City ne me suffit plus. Un arc, des flèches et du judo ne me permettront pas d'éradiquer la misère, même à l'échelle d'une seule ville.
Assumant enfin mes responsabilités, j'ai repris les rennes de l'affaire familiale, utilisant les fond récoltés par Queen Industries pour financer des œuvres caritatives à travers toute la ville... Si tout ce passe comme prévu, je pourrais étendre mon projet aux métropoles du monde entier.
Quand à Roy, je sens qu'il s'éloigne petit à petit de moi... Cela me rend bien sûr un peu triste, mais j'ai conscience que c'est inévitable. C'est un adulte désormais et il est destiné à de bien plus grandes choses qu'à rester mon partenaire toute sa vie.
Finalement tout cela m'a redonné le moral. J'ai encore du temps devant moi... Et beaucoup d'objectifs à accomplir. J'agirais à mon échelle et je le ferais de toutes mes forces... Je ne suis peut-être pas capable de lutter contre des types qui volent ou balancent des lasers, mais je peux au moins essayer de rendre le monde meilleur qu'il ne l'était auparavant, à ma façon.
Peu importe que l'on se souvienne de Green Arrow comme un héros de seconde zone, tant que l'on se rappelle qu'Oliver Queen aura consacrer sa vie et sa fortune à créer une société un peu plus juste...